Initiative unique en France, l’association Atinord qui gère près de 6 800 mesures de protection a organisé le 20 mai 2014 une rencontre avec environ 150 majeurs protégés venus du département du Nord et de Belgique. Dans le prolongement des groupes d’expression de majeurs bénéficiant d’une mesure mis en place depuis 2007, cette rencontre constituait pour l’association un moment d’écoute essentiel pour revisiter son projet associatif et son projet de service, dans une volonté affichée de promouvoir et de développer les capacités des personnes accompagnées.
L’objectif de cette journée était de favoriser l’expression des majeurs protégés sur le ressenti qu’ils ont de leur mesure de protection. La rencontre a abordé plusieurs points :
- J’ai une mesure de protection. A quoi cela sert ? Comment cela se passe ?
- Dans ma mesure : qu’est-ce qui va ? Qu’est-ce qui ne va pas ?
- Qu’est-ce qu’il faut changer ? Qu’est-ce qu’il ne faut pas changer ? Que faut-il améliorer ?
Cedric Mametz, président de Nous aussi, association d'auto-représentants de personnes handicapées intellectuelles, était le grand témoin de cette rencontre. Animée par Corinne Clermont, vice-présidente de l’association Nous Aussi, la rencontre s’est déroulée de façon à promouvoir la parole des majeurs protégés, en présence de témoins invités… à écouter. Celle-ci a été ponctuée de séquences vidéos réalisées lors de groupes d’expression et des cartons de couleur étaient disponibles sur les sièges afin de permettre aux personnes protégées d’intervenir pendant les débats pour demander à ralentir ou à reprendre certains points. Grâce à ces conditions d’organisation et d’animation, la rencontre a réussi son pari : créer un climat de confiance pour permettre un espace de dialogue ouvert et participatif.
Parmi les éléments à retenir, il faut noter que de nombreux participants ont tenu à remercier les mandataires qui sont à leurs côtés « j’ai la chance d’avoir un curateur qui est humain », « un grand merci pour le travail qu’ils font ».
Mais au-delà des compliments, les majeurs protégés profitent de l’occasion qui leur est donnée pour exprimer leurs besoins et faire des propositions. Ainsi, le besoin d’autonomie est affirmé « je peux aller acheter une machine à laver tout seul », « je voudrais avoir mes factures pour faire un dossier, avoir mes papiers ». Le droit de vote a été évoqué à plusieurs reprises « je voudrais bien voter », « il faudrait aussi que le juge des tutelles envoie des couriers aux mairies quand les personnes ont retrouvé le droit de voter ».
Le besoin d’une plus grande disponibilité des services mandataires est également pointé : « il n’y a qu’une ligne pour les appeler », « tous les après-midi c’est fermé ». Il s’agirait également de permettre aux travailleurs d’ESAT de ne plus devoir poser de congés pour rencontrer leur mandataire. Par ailleurs, les temps de rencontre et d’échange sont revendiqués, que ce soit avec le mandataire : « des fois en une demi-heure on n’a pas le temps de comprendre, alors on fait semblant », ou avec le juge : « dommage que je n’aie pas vu le juge des tutelles », « j’ai une mesure depuis 2007, je n’ai vu le juge que l’année dernière ».
Enfin, le financement de la mesure pose question. Pour ATINORD, si la mise en place d’une mesure est un droit, le suivi de la mesure devrait également relever de la solidarité nationale pour les personnes ayant de faibles revenus.
